Médecin de campagne : L’impact des suppressions de sites de collèges

L'impact des suppressions de sites de collèges

VOUZIERS (Ardennes). Désiré Nanji, médecin à Buzancy, tire la sonnette d’alarme au sujet des menaces sur les sites de collèges. Il dénonce un double discours gouvernemental.

À 41 ans, Désiré Nanji pourrait être ailleurs. En ville, comme beaucoup de ses confrères. Mais cet homme de conviction refuse d’abandonner la ruralité.

Conforté par un discours volontaire du gouvernement sur la lutte contre les déserts médicaux, il déchante aujourd’hui en voyant le site de collège de Buzancy menacé.

Il nous a contactés pour apporter sa vision du dossier.

Docteur Nanji, quels sont vos liens exacts avec le territoire que vous défendez ?
D.N. :
« Je me suis installé ici il y a 12 ans, j’en ai 41 aujourd’hui. Je suis le seul médecin pour les 1 500 habitants du canton et je suis forcément surchargé de travail. Il faudrait deux cabinets.
Comme d’autres confrères, je fais des efforts, je joue le jeu en ayant une banque locale, en travaillant avec la pharmacie de la commune, en allant dans les commerces, en participant à la vie associative…
Mes détracteurs feront remarquer que mes enfants ne sont pas ici, mais ce sont les circonstances de la vie qui l’ont imposé.
Mais ça prouve justement que ma position est désintéressée ; je pense à l’avenir de Buzancy et de son canton.»

Justement, quelle est cette position ?
« Quand on écoute Marisol Touraine, ministre de la Santé, on comprend que le gouvernement veut faire en sorte de mettre des médecins dans les zones de déserts médicaux, et de maintenir ceux qui sont en place.
Mais, malgré mon naturel optimiste, je constate un abandon des services publics de plus en plus marqué, la dernière étape concernant aujourd’hui la menace sur le collège. Si on raisonne simplement en termes de rentabilité, la bataille est perdue d’avance pour l’éducation.
C’est très bien de parler d’Ehpad, de maisons de retraite. Mais il faut aussi la richesse de la jeunesse, et donc les structures pour l’accueillir. Il faut au minimum une école, quelques commerces, une banque, une poste…
Il y a visiblement un double-discours et je suis très pessimiste sur l’avenir du monde rural. »

Pourtant, localement, certains habitants de Grandpré sont pour l’absorption de Buzancy. À tort ?
« Parmi mes patients, certains sont effectivement pour les évolutions annoncées. Mais dire « moi, ça ne me gêne pas », ce n’est pas suffisant.
L’enjeu dépasse nos cas personnels. Aujourd’hui, c’est Buzancy, mais on sait déjà que ça continuera après. Pour moi, c’est justement l’esprit de cette méthode : diviser pour mieux régner.
On éclate un premier site, puis les gens se dispersent ou s’opposent, et on a moins de mécontents à affronter l’année d’après.»

Songez-vous à quitter le secteur de Buzancy en cas de fermeture du site de collège ?
« Je n’ai pas envie de faire du chantage. Mais les confrères qui font des efforts souhaitent que les politiques récompensent un minimum ces efforts.
S’ils ont un sentiment d’injustice, ils tireront forcément les conséquences nécessaires en temps et en heure. »

Propos recueillis par Jacques BERTHION

Article paru dans l’Ardennais du 30 janvier 2013:

http://www.lunion.presse.fr/article/ardennes/limpact-des-suppressions-de-sites-de-colleges

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